Bien débuter quand on veut voyager en voilier

Cette fois, il est temps de rentrer dans le vif du sujet et de répondre à la grande question : comment, lorsque l'on est débutant, fait-on pour partir voyager en voilier ?

Vaste question ! Il faudra beaucoup de temps pour y répondre, tant le sujet est grand, tant il y a de points à aborder. Mais je vais essayer, à travers une série d'articles et de témoignages, d'apporter certaines réponses à celles et ceux qui rêvent de partir en voyage à bord d'un voilier.

La première étape est de faire un état des lieux de votre projet afin de déterminer sa faisabilité. Pour vous aider, j'ai listé des points à aborder et de bonnes questions à se poser.

Je vous rappelle que ces articles s'adressent principalement aux novices et aux débutants, mais si vous êtes déjà un navigateur aguerri, vous pouvez sûrement apporter votre point de vue et témoigner de vos expériences.

Autre point extrêmement important, tous les projets sont différents, chaque équipage a sa personnalité et bien évidemment tous les budgets ne sont pas les mêmes ! Le choix du bateau, la durée du voyage, la caisse de bord mensuelle sont déterminés par votre budget. Comme je le dis souvent en rigolant, ce n'est pas le vent qui fait avancer les voiliers, c'est l'argent ! Mais nous verrons qu'avec un budget modeste, il est possible de réaliser de très beaux voyages !

Dans un premier temps, posons-nous quelques questions.

Pour un débutant, il est essentiel de faire le tri entre ce que vous imaginez et ce qu'est la réalité d'un voyage à la voile. C'est un chapitre extrêmement important pour vraiment savoir ce qu'implique de tout larguer pour voyager à travers le monde en voilier. Je ne suis pas là pour vous vendre du rêve ni pour vous décourager, mais pour être le plus objectif possible et vous apporter une vision la plus limpide possible.

Il y plusieurs barrières à la réussite et au bon déroulement d'un projet. Un manque de lucidité, une mauvaise préparation, un budget mal calculé, le manque d'expérience… J'ai si souvent vu des projets ne jamais voir le jour, tant de projets arrêtés après juste quelques mois de voyage par manque de préparation. Le projet de voyager en voilier s'appuie sur le désir de découverte, d'exploration, d'aventure avec ses galères et ses joies, mais aussi l'envie de changement de vie et surtout le «rêve» d'une certaine forme de liberté (oui, une certaine forme… mais on en reparlera… ). Un projet mal préparé va rencontrer de multiples soucis et mésaventures. Le pire étant d'avoir tant travaillé, tant espéré et surtout tant dépensé pour que la fête soit gâchée par le quotidien de soucis pour finalement revendre le bateau et revenir à une vie sédentaire.

Mais il est à la portée de beaucoup de bien se préparer et de vivre une expérience unique en famille, en couple ou en solitaire. La réussite s'appuie sur une vertu qui semble disparaître peu à peu… La patience ! La patience de se former, de suivre une courbe d'apprentissage qui sera à elle seule une réelle découverte, car oui, la préparation, c'est déjà le début du voyage. La technologie est une aide précieuse pour tous les navigateurs, mais elle peut être pour les novices un leurre, un voile sur la réelle connaissance de la mer, des bateaux et de la navigation.

Durant mes coaching, j'attache une grande importance à cet aspect de la représentation que se font les équipages vis-à-vis de la vie en bateau et en mer.

Les réseaux sociaux et notamment YouTube sont des sources d'information fantastiques. Combien de fois nous avons tous réussi à résoudre des petits soucis de bricolage à bord grâce à une vidéo en ligne ? La multiplication de chaînes consacrées à la voile est à mon sens une bonne chose (mais cela n'engage que moi). Cela permet de créer une immense communauté de navigateurs. Les réseaux sociaux sont aussi vecteur d'envie pour les débutants, car, suivre les aventures de voyageurs à la voile partageant leur vie avec les bons et les mauvais côtés est une façon de découvrir ce monde merveilleux qu'est le voyage en bateau.

Mais attention, car comme je le disais plus haut, chaque projet, chaque équipage est différent. Le curseur de chacun ne sera pas le même, en termes de confort et de sécurité, de budget… Soyez le plus objectif possible lorsque vous suivez les aventures d'un Youtubeur, il n'est pas vous ! Personnellement, j'encourage les gens à suivre certaines chaînes YouTube, notamment des chaînes anglo-saxonnes qui peuvent apporter beaucoup d'informations.

Le piège des réseaux sociaux est la vision tronquée, filtrée pour ne montrer que le meilleur. La Van Life a souffert de ces images d'une « Pépette » prenant son thé à l'arrière de son van en face d'un merveilleux lever de soleil… Cela existe également chez les voileux et je ne fais pas exception ! Je partage plus de couchers de soleil que de galère moteur… Promis, mes prochains posts seront sur mon inverseur qui va sûrement rendre l'âme… Pas sexy, mais c'est aussi une partie de mon quotidien.

Le désir du pédagogue est de pouvoir offrir un enseignement simple et rapide à ses élèves. Mais la plupart du temps, on doit faire face au problème du formatage, des idées toutes faites, des à-prioris. Il n'est pas simple de nos jours d'être une page blanche sur laquelle un enseignant pourrait écrire tout de suite les bonnes informations essentielles au bon déroulement de votre apprentissage. Bref nous ne sommes pas des robots !

Parlons un peu de votre futur voyage. Plus vous désirerez aller loin et longtemps, plus l'engagement sera important. La notion d'engagement reviendra souvent dans mes articles. Plus l'engagement est important, plus les notions de préparation et d'expérience devront être importantes.

Nous allons prendre trois projets de voyage en voilier à trois niveaux d'engagement différents.

Cas numéro 1 :

Acheter et préparer un voilier pour naviguer l'été dans le sud de la France, visiter la Corse et les Baléares

Cas numéro 2 :

Acheter et préparer un voilier pour réaliser un tour de l'Atlantique en famille : au programme, Madère, les Canaries, le Cap Vert, le Sénégal, les Antilles, et enfin transatlantique retour en passant par les Açores puis retour soit en Bretagne soit en Méditerranée sur durée de plus ou moins une année.

Cas numéro 3:

Un tour du monde par les Alizés sur 5 ans.

Cas numéro 1:

C'est de loin le moins engagé ! Vous aurez le choix d'acheter un voilier plus petit, avec des équipements plus simples que pour de grandes traversées hauturières. La notion de caisse de bord sera également simplifiée, car vous effectuerez les navigations pendant vos vacances si vous êtes toujours dans le monde du travail. Être retraité vous donnera bien évidemment un petit plus en terme de temps. Votre niveau d'expérience de navigateur sera aussi un point plus simple, car vous aurez le choix de naviguer en zone côtière pour faire vos armes avant de vous élancer vers de plus grandes navigations vers la Corse, les Baléares ou plus encore les Îles Éoliennes ou la Grèce… Ce cas s'adapte également aux personnes désirant naviguer en Manche, en Bretagne ou sur la face Atlantique française. Votre niveau de navigateur nécessitera un apprentissage sûrement plus important. Loin de moi de vouloir dénigrer les navigateurs Méditerranéens, j'aime énormément cette mer qui m'a tant offert ! Mais la gestion des courants et des cailloux rend les navigations bretonnes plus techniques. Comme je le dis pour plaisanter : la Méditerranée est dure pour les nerfs, la Manche est dure pour les estomacs !

Ce premier cas a ses particularités : l'utilisation réduite de votre embarcation induira une solide réflexion concernant son stockage à terre ou dans l'eau. Cela peut impliquer des frais mensuels ou annuels relativement importants qui dépendent de la taille de votre bateau. Un voilier qui navigue peu demandera un entretien irréprochable, et ce pour plusieurs raisons. La première est que lorsque le moment sera venu d'aller naviguer, vous ne voudrez pas rester au port ou à sec pendant la durée de vos vacances à cause de pannes qui aiment surgir lorsqu'il est temps d'aller faire du bateau ! La deuxième est qu'un voilier qui passe plus de temps à terre ou au bout de ses amarres ne sera pas forcément bien ventilé. Avec les problèmes d'humidité à bord, peuvent surgir certains soucis. Vieillissement de l'habitacle, des installations électriques et électroniques. L'hivernage est un art que vous devrez maîtriser.

Cas numéro 2:

Peu importe que vous partiez de Bretagne ou de Méditerranée, vous allez dans ce deuxième cas traverser un océan et ce dans les deux sens. Beaucoup vous diront que de traverser l'Atlantique ce n'est rien ! Oui, ils le disent, car ils sont prêts ! La traversée d'un océan, au-delà du challenge personnel que cela représente, est le point d'orgue de votre préparation. Jamais votre bateau n'aura été si préparé, si fignolé que la veille de votre départ pour une transatlantique.

Maintenant, essayons de déterminer ce qu'est une transatlantique réussie :

Personne n'est mort ! Non là, je déconne… Mais oui, pas de blesser à déplorer. Et évidemment, oui, vous êtes arrivé de l'autre côté ! De l'autre côté, mais dans quel état ? Vous, le bateau, l'équipage… Une transat qui se déroule comme dans un rêve, c'est déjà un peu de chance pour avoir des conditions météo clémentes tout le long. C'est aussi à l'arrivée, un équipage heureux d'avoir vécu cette nouvelle expérience. Un équipage qui se parle encore est aussi une bonne chose !

Côté bateau, il est important d'arriver de l'autre côté avec une embarcation en bon état. Car oui, vous n'avez pas dépensé tout cet argent et fait tous ces sacrifices pour recommencer à bricoler une fois arrivée aux Antilles ! Sans oublier que vous devrez traverser l'Atlantique dans l'autre sens. Un trajet retour, par ses risques météo, est encore plus engagé. Être de retour en France avec un bateau en bon état, c'est l'assurance de le revendre rapidement et à bon prix.

Mais avant de traverser l'Atlantique, il faudra vous placer sur la ligne de départ soit aux Canaries, soit au Cap vert et pour certains au Sénégal. Cela vous demandera une bonne préparation et un bon entraînement afin de ne pas avoir de soucis avant même d'être sur la ligne de départ.

Il y a tant de choses à penser et à gérer que cela peut donner le tournis. L'influence des réseaux sociaux peut parfois induire en erreur certains dans leurs décisions, car ce sont des choix qui se font sans expérience.

Côté engagement, nous montons de deux crans. Il y a le côté financier qui augmentera, car la préparation coûtera plus d'argent. Mais aussi le fait que vous ne ferez pas cela durant vos vacances. Il faudra avoir le temps et la caisse de bord pour une année complète.

Les durées des tours de l'Atlantique sont variables d'un équipage à l'autre et selon si vous partez de Méditerranée ou de Bretagne (sud si possible…). Car quand la machine à dépression se met en marche, il peut être compliqué de traverser le golfe de Gascogne. Nous le voyons bien cette année avec la transat Jacques Vabre. Si des « Imoca 60 pieds open» restent à quai, qu'en est-il pour des bateaux de plaisance. Les Bretons partaient souvent un peu plus tôt que les Méditerranéens. Comptez une année complète pour un beau tour de l'Atlantique en prenant en compte les aléas météorologiques.

Cas numéro 3:

Les «tours-du-mondistes» sont plus rares depuis la fin du COVID, pour beaucoup des raisons dont j'essaierai de vous parler dans un autre article. Car oui, faire un tour du monde à la voile par les Alizés n'est pas forcément un long fleuve tranquille. De deux choses l'une ! Soit vous êtes un climato-sceptique et tout ira bien ! Ou vous avez une certaine conscience environnementale et vous avez observé certains changements… Rien n'empêche pour le moment de faire le tour, mais il est vrai que l'Océan Indien en refroidit plus d'un…

La grande différence entre un «simple» tour de l'Atlantique et un tour du monde, c'est l'engagement en termes de budget «caisse de bord», car vous ne ferez pas le tour du monde en une seule année. Certains qui aiment passionnément faire du bateau (oui, oui, j'en connais 3 !) bouclent un tour du monde en 1 an et demi. D'autres plus raisonnablement en 3 ans. Et le minimum idéal sera 5 ans. Mais tout cela est une question de choix et de curseur encore une fois.

Il est essentiel de se poser plus de questions lorsque vous envisagez un tel voyage. Pour en citer un dans cet article :

La famille ! Votre famille sera loin et il est peu probable de rester plusieurs années sans les voir. Alors oui, ils viendront vous voir, mais cela n'est pas toujours aussi simple que ce que l'on pense. Rentrer en France pour quelques semaines implique de stocker correctement votre voilier à l'abri des phénomènes météo destructeurs comme les cyclones ou les tempêtes. Les billets d'avions sont parfois extrêmement onéreux et multipliés par le nombre de membres d'équipage. Les équipiers modèles réduits que l'on appelle enfants eux paieront moins cher…

Et la plus grande des dépenses et là aussi je parle en connaissance de cause… La bouffe ! Car oui, après plus d'un an passé à l'étranger et une fois rentré en France, vous allez manger ! Car oui, vous voulez quitter la France pour des tas de raisons, mais vous y reviendrez pour la bouffe ! Vous allez grossir comme jamais en l'espace de 3 semaines. Maman et Tati vous attendront à l'aéroport avec du fromage, des rôtis et de la charcuterie Made in Chez Nous ! Une fois engraissé, il faudra reprendre l'avion dans l'autre sens. Je vous parle des suppléments de bagages ou avez-vous compris le message ?

Bref, vous l'aurez compris, un tour du monde demande un engagement important et c'est aussi sûrement pour cela que les candidats sont moins nombreux.

J'espère que cet article vous aura aidé et quelque peu diverti. Ce n'est que le début, car je vais essayer de partager plus d'articles comme celui-ci dans l'avenir. Si vous avez des sujets à me suggérer, je suis à votre écoute. (oui oui on parlera de Starlink...!)

Vous avez un projet de voyage et vous cherchez un coach pour vous accompagner dans le début de cette aventure, je propose mes services. Vous pourrez lire la page de mon site consacré au coaching voyage à la voile ou me contacter directement.

Bonne fin de journée à tous.

Valéry